
Départ, 4h du mat’
Cette année, les départs auront lieu du Foyer municipal de Bourg d’Oisans. Exit donc, la longue montée de la Romanche, depuis d’abord Grenoble puis Vizille. Si certains regretterons ce long échauffement entre les cimes étoilées, je ne peux que me réjouir de ce changement et de cet abandon qui n’apporte aujourd’hui plus grand chose. Une route trop large, trop droite, trop circulée, bref, devenue trop dangereuse. 2h30, le réveil sonne depuis l’hôtel d’Oz-en-Oisans où nous avons pris nos quartier. Déjeuné rapide, un strap sur le pied gauche pour tenter d’atténuer la douleur provoquée par mes nouvelles chaussures et le chargement express de la voiture. Oz n’est pas très loin mais la descente vire sévère et je n’ai pas les yeux bien ouverts. Je me force à rester prudent, après tout. Ce n’est que du vélo !!! 3h45, sur le parking en gravier fléché à l’entrée de Bourg, un contre la montre commence. Régis croisé hier en rentrant de Solude partira à 4h. Et connaissant Régis, il n’est certainement pas en retard !!! 4h, j’arrive sur la ligne, tandis que les premiers cyclos s’élancent. J’entends alors le Speaker qui annonce que le BRA partira en trois vagues. 4h, 5h et 6h. Pas le temps de réfléchir, je prend la suite du groupe et croix de bois, croix de fer, ferais brûler un cierge en espérant revoir Régis un peu plus loin….

Le barrage de Grand-Maison
Fort de mes expériences par ce départ très classique, j’opte pour la prudence et n’hésite pas à m’arrêter dès l’entame du col pour tomber le K-WAY. Après les fortes chaleurs d’hier, la nuit est particulièrement douce et il est très agréable de pouvoir en profiter. Premiers hectomètres, premières rampes, sévères. La Croix de Fer est un grand col, un classique du Tour. Il se respecte. Et sait se faire respecter. Car je n’oublie pas la Marmotte de l’an dernier où, bercé d’illusions, j’avais coché toute les cases qui, dans le Galibier, me firent exploser… Prendre un rythme souple dès le début. Gérer les premiers kilomètres aux pentes avoisinant souvent les 9%. Récupérer sensiblement dans la descente pour en danseuse abordes la remontée du barrage. Terrible. Mais si grisante, dans les premières pâleurs du jour. Longer le barrage de Grand-Maison, s’isoler pour se placer aux premières loges d’un spectacle dont décidément je ne me lasserai jamais. Assister à la naissance éternelle du jour, dans le découpage des sommets… Retenir sont souffle. Et être touché par le premier rayon chaud qui donne vie aux montagnes…
Regonfler à bloc dans les 3 derniers kilomètres qui mènent à la bascule entre Oisans et Maurienne. Tenir le choc face aux kilomètres qui s’accumule. Apprécier ces dernières semaines plus calmes qui, après une longue et épuisante série de brevets, m’ont permises de remettre les batteries à niveau. Le corps est un formidable instrument pour qui sait en prendre soin. Les périodes de récupérations font parties de l’entraînement. Voici peut-être ce que m’auront appris ces années après des débuts où tout absolument devait pouvoir s’enchaîner. Il faut bien l’avouer. S’il reste la résistance, il n’y a plus ni cette capacité à récupérer ni cette insatiable envie d’aller plus loin. Le vélo devient de plus en plus accessoire. Un prétexte et un moyen permettant de rendre possible ce que la mécanisation du vide ne permet pas. Aujourd’hui, à la force des guibolles et de ma volonté, je me suis hissé au sommet d’un col qui un jour fit la légende de grands coureurs, qui chaque année, fait le bonheur de nombreux amateurs.

Sommet de la Croix de Fer, tout y est !!!
Et parce que la montagne reste la montagne, les cimes si belles si dégagées de l’Oisans vont laisser place à un ciel brumeux et glaciale dans la longue descente technique du Col aux rambardes forgées d’un métal qui n’existe plus. Enfilades d’épingles sur une route étroite mais déserte. Vertige d’une chute contrôlée vers les abîmes. D’un instant magique de physique élémentaire. Tout corps libre chute dans un élan inimitable… Mains ancrées dans le creux du cintre, centre de gravité placé judicieusement bas, freinage dosé pour annihiler le plus faiblement possible cette gravité venant des entrailles du noyau terrestre. Si grimper est un exercice de corps, descendre est d’une certaine façon un trait d’esprit.

Dans la descente de la Croix de Fer, le brouillard fait son apparition
Saint Sorlin d’Arves, la brume s’accompagne désormais d’un air des plus glaciale. Heureusement, la route va se mettre à monter jusqu’à un joli col que l’on appel Mollard. Oh non pas que ce col est aussi mythiques que nos compagnons du jour. Mais il offre d’habitude de beaux panoramas sur un village perché et les aiguilles d’Arves. Le col est régulier mais j’ai un peu de mal à remettre en route, à cause du froid probablement. Heureusement, il y a les maillots cyans du club de Bletterans. Alors ça pour un hasard !!! Je remonte à leur hauteur, et reconnaît Didier avec qui j’avais la semaine dernière discuté un peu des Origines… Des Origines Axxomes RS et du tout dernier qu’il aimerait bien s’offrir. Nous ferons la montée en discutant, de la belle initiative que constitue ces 24h, de ce que j’avais aimé, de ce que j’aimerai voir évoluer… Il est vraisemblable que les 24h de Bletterans changent un peu l’an prochain, et c’est bon signe, c’est la clé aujourd’hui pour survivre.
Au sommet du Mollard, il y a un petit point d’eau qui aujourd’hui permettre de regrouper les troupes. Je laisse là Bletterans se reformer, et m’élance, dans la descente qui vire-vire et revire…
Un petit groupe roule compact en direction de Saint Michel de Maurienne, où nous trouverons le pointage marquant l’assaut du col du Télégraphe. Il y a aussi un ravitaillement. Et le moins que l’on puisse dire est qu’il n’est pas chiche. Un sandwich, du Muesli, des compotes, des yaourts…Le CTG déborde de bienveillance alors je n’ai pas le cœur à refuser, et je charge, je charge… L’assiette est pleine, l’assiette déborde. Dans la grande salle, il y a des tables, il y a des chaises… Alors je pense à la Marmotte. Qui peut quiner autant qu’elle peut avant de me revoir…
Et puis il y a Régis. Qui à ce moment du spectacle a le sourire. Et la tchatche. Il faut qu’il est dans son élément Régis. Le BRA. Un rituel avant chacun de ses déjà 6 Paris-Brest… Et ce n’est pas le seul, vue les nombreuses chasuble et maillot bleu Eiffel que j’ai croisé. Si seulement cela pouvait aussi marcher pour moi 🤞…
Nous sommes repartis dans les jolis virages du Télégraphe. Le Willier bleu et jaune s’est envolé, à une cadence fulgurante. Mais Bletterans était là. Et le Télégraphe a été déroulé, comme nous avions déroulé le Mollard. A une allure Modeste mais Efficace. Finalement, je l’aime bien ce petit marche-pieds qui mainte fois m’a fait déchanté lorsque, en cigale, je me trouvais fort dépourvu dans les pentes du Galibier… Il suffisait de rouler en dedans. Et d’apprécier les nombreux lacets ombragés qui parsèment cette montée surplombant la Maurienne.

Col du Télégraphe, en compagnie de Bletterans, et du groupe qui sur Solude nous a accompagné
Valloire grouille de monde mais c’est un peu plus loin que nous nous arrêterons au ravitaillement solide du midi. C’est des pâtes, c’est simple, mais ça fait super plaisir surtout quand les bancs sont installés à l’ombre de grands chapiteaux. Régis est là avec deux copains Paris-Brest. Le groupe Solude aussi. Et Bletterans quant à eux arriveront bientôt. Après la Croix de Fer ce matin, nous allons retrouver un colosse fabuleux. J’ai nommé. Le Galibier. Ce col je le connais par cœur et pourtant chaque montée, quand les jambes répondent, est un plaisir. 2642m à gravir pour se sentir un peu plus grand. Une végétation qui peu à peu laisse place à un festival de roches gigantesque et ces derniers kilomètres, loin de la Terre. Et puis la cime déjà. Une montée parfaitement gérée cette fois. S’approcher du ravin, coté Meije, et tel l’aigle veillant sur le sommet, fondre sans freins dans la descente.

Col du Galibier, toit du B.R.A. éternel

K-Way jaune, pour un petit bout de légende 😉 !
Le Lautaret, par cette première descente qui jadis m’impressionnait tant. Il ne reste plus qu’à laisser rouler, pédalant malgré tout face à un vent violemment canalisé par la forme de cette vallée. Alors tandis que nous roulions déjà le long des eaux turquoises du Lac Chambon, avouez qu’il aurait été dommage d’arrêter si vite. Heureusement, le CTG a pensé à vous et propose un autre joyaux que l’on appel Sarenne. Un col à l’ancienne, sur une belle route pastorale. Une belle vallée aussi, où la roche grise ondule sous le blanc éclatant des glaciers. Alors une fois de plus et après un petit contre-temps, quand la route s’est élevé Régis c’est envolée. Me laissant d’abord seul avec mon grand pignon puis en compagnie d’un mec bien. Un mec qui roulait sur un vieil acier, celui de ses 21 ans, repeint dans un beau vert émeraude pour l’occasion. Nous ferons un bout de route ensemble, discutant du vélo, du plateau d’Emparis, des plateaux du Cézallier et de ses vaches rouges. Et puis le col au détour d’une épingle décida que nous nous égarions à parler ainsi et nous sépara comme pour mieux nous rappeler à lui. Partout il y avait des Cascades et autres Aiguillettes. Je me régalais.

Col de Sarenne, au terme de l’effort
Me voici enfin au sommet de ce dernier col. Pas épuisé, mais franchement content d’être presque arrivé au bout (… il reste le passage du Pas de la Confession tout de même qualifié du Plus). Il y a quelques semaines, je n’aurais pas misé une pièce dessus, mais voilà. La forme va et vient. Bien aidé lorsque l’organisation est top. Le B.R.A. est un truc à faire et à refaire. Pour le défi et le spectacle de tous les instants. Alors rendez-vous en 2025 ou 2027, il faut savoir se projeter 😉 !

